L
es premières estimations du revenu des agriculteurs pour l’année 2021 réalisées par Statbel, l’office belge de statistique, ont été communiquées à la Commission européenne (Eurostat) en cette fin décembre.
Des chiffres compilés par l’Office, il ressort que la valeur ajoutée nette de l’agriculture reculerait de 8,2 % en 2021 en dépit d’une augmentation de 9 % de la valeur de la production agricole. En effet, l’augmentation des prix des consommations intermédiaires (tout élément utilisé dans le cadre d’une production végétale ou animale) est estimée à 15,4 %. À cela, s’ajoutent des conditions météorologiques défavorables aux rendements céréaliers et horticoles (poires et tomates, par exemple).
En prenant en considération les dépenses liées à la rémunération de la main-d’œuvre et les transferts publics (taxes et subsides non directement liés à la production), le revenu des facteurs de production diminuerait de 7,2 %.
Les prix des intrants bondissent
La hausse des consommations intermédiaires est due, en grande partie, à l’évolution du prix des intrants. Si l’année passée, les prix de l’énergie avaient chuté, ils ont fait plus que se rattraper cette année. L’impact ne se ressent pas uniquement sur les carburants et combustibles mais également sur le prix des engrais (le gaz étant un élément essentiel à la fabrication des engrais azotés). Certains sites industriels, au vu des coûts croissants de production, ont suspendu la production de ces engrais, accentuant ainsi la hausse des prix et faisant planer un risque de pénurie. Les prix annuels des engrais sont estimés 1,5 fois supérieurs à ceux de l’année dernière.
Au-delà de l’énergie, le prix de l’alimentation animale a également augmenté, ce qui impacte négativement la rentabilité des différentes filières d’élevage. La hausse exceptionnelle des prix des céréales et des oléo-protéagineux sur les marchés européens et mondiaux tire à la hausse la rentabilité de ces cultures mais a, elle aussi, un effet négatif sur les filières d’élevage. Les prix des aliments s’affichent accusent finalement un bond de 15 %.
Production végétale : rendements en repli, prix en hausse
Malgré cette hausse des coûts, la branche végétale profite d’une amélioration de la valeur de production des cultures. Celle-ci devrait augmenter de 15,2 %, essentiellement dopée par des effets prix, en particulier pour les produits céréaliers.
En se basant sur les prix de début de campagne, Statbel prévoit une hausse des prix au producteur de l’ordre de 26,9 % pour les
céréales
. Cette hausse permet de combler des volumes de production en nette diminution (-7,8 %).
Tout spécialement, les rendements du froment d’hiver et de l’épeautre ont pâti du froid et des pluies des mois d’été. Les moissons ont dû être interrompues à plusieurs reprises et, malgré une augmentation des emblavements, la production de froment d’hiver a baissé par rapport à l’année passée de 7,1 %. La production d’épeautre s’en sort mieux, uniquement grâce à une hausse des superficies de 22,4 %, permettant ainsi à la production de monter de 9,1 % par rapport à 2020.
Le rendement des
oléagineux
devrait aussi accuser un repli, ramenant la production 6,9 % en deçà de la campagne précédente. Les prix actuels sur les marchés permettent cependant d’estimer une impressionnante amélioration de la valeur de production de 51,1 %.
Pour la culture de
betteraves sucrières
, la légère hausse des rendements (+2,3 %) vient, partiellement, pallier la diminution des superficies emblavées (-2,9 %). Les prix du sucre blanc sur les marchés européens laissent présager une légère hausse du prix au producteur pour la campagne en cours, de sorte que la valeur de production de la culture devrait progresser de 3,5 %.
Au niveau
horticulture
, les récoltes auront été fructueuses pour les fraises, baies et pommes. Par contre, comme ailleurs en Europe, la production de poires est en recul. Le gel du mois d’avril et l’été pluvieux ont amoindri la production. Les prix au producteur actuellement observés devraient permettre de contrebalancer ces pertes. La valeur de la production fruitière augmenterait de 32,6 % alors que celle des légumes ne progresserait que de 2,4 % par rapport à 2020, avec une diminution du volume de production, notamment des tomates, et une augmentation de 6,8 % des prix.
Production animale : embellie pour les bovins
De manière globale, la valeur de la production animale est stable, l’évolution annuelle du volume produit serait de 2,1 % et les prix baisseraient de 2,7 %.
Bien sûr toutes les filières ne sont pas logées à la même enseigne et la
filière porcine
continue, cette année, d’attirer toutes les attentions. Si la Belgique a retrouvé son statut indemne de peste porcine africaine, la filière n’en ressort pas indemne pour autant. Premièrement, tous les embargos ne sont pas levés. Deuxièmement, le marché européen est en excédent de production et les exportations vers l’Asie sont difficiles.
Le problème dépasse le cadre national. Les prix au producteur sont donc mis sous pression partout en Europe. En Belgique, on estime la chute des prix à 17,5 % en un an alors qu’en 2020, déjà, les prix étaient à la baisse. La hausse de la production de 6,0 % ne suffirait pas à relever le secteur qui devrait voir la valeur de sa production diminuer de 12,5 % entre 2020 et 2021.
Les
filières avicoles, ovines et caprines
voient, quant à elles, leur valeur de production croître sous l’effet de hausses de prix : +18,7 % de valeur de production pour la volaille et +21,8 % pour les ovins et caprins.
Enfin, l’
élevage bovin
profite d’une embellie de prix que ce soit au niveau viandeux ou laitier. La production de carcasses est estimée 2,8 % inférieure à 2020 mais les prix progressent, surtout sur les meilleures conformations. La valeur de production devrait grimper de 3,6 %. Pour le lait, après avoir chuté en 2020, les prix repartent à la hausse (+14,3 %). Avec une production estimée relativement stable au niveau belge et européen, la valeur de production devrait augmenter de 15,7 % en 2021.