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Plans stratégiques nationaux : les principales orientations des États membres

Malgré le retard de certains pays, la commission a entamé l’examen des premiers plans stratégiques nationaux, les déclinaisons de la future PAC propres à chaque Etat-membre.

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Peu à peu, la plupart des États membres de l’UE remettent leurs projets de plan stratégique de la PAC à la commission qui avait fixé la date limite de 31 décembre 2021.

Mais certains sont en retard : l’Allemagne, la Belgique (qui doit finaliser deux plans : l’un pour la Flandre, l’autre pour la Wallonie), la Bulgarie, la Roumanie et la Slovaquie. Cette dernière devrait être la prochaine à rendre officiellement son projet, le gouvernement slovaque ayant officiellement approuvé le plan stratégique national le 10 février. Vingt-deux États ont par contre déjà rendu publics leurs projets. Certains font 400 pages (celui d’un petit pays comme Malte par exemple) quand d’autres en font 4.000 pages (l’Espagne avec ses nombreuses régions autonomes). De plus, faute de temps (les actes secondaires de la législation ayant été adoptés très tardivement), les États membres ont demandé à la commission un délai pour finaliser certaines annexes de leurs plans, celles concernant l’évaluation environnementale et l’évaluation ex ante en particulier.

La commission a déjà entamé un examen des projets dont elle dispose et a déjà identifié quelques lacunes, notamment en ce qui concerne la lutte contre la résistance aux antibiotiques. Cet examen est d’autant plus important qu’une large subsidiarité a été accordée aux Vingt-sept avec la nouvelle PAC qui entrera en vigueur en 2023 autour de deux grands axes : l’environnement et la meilleure répartition des aides (vers les petites exploitations, les jeunes agriculteurs…).

Difficile, encore, de mesurer réellement la portée de ces plans mais il est quand même possible d’identifier les grandes orientations prises par chacun. Alors qu’en France, le projet de plans stratégique proposé s’inscrit dans la continuité de la politique actuelle, avec quelques ajustements, certains entament des virages plus marqués en utilisant les flexibilités qui leur ont été octroyées pour répondre aux défis spécifiques de leur agriculture : réduction des nitrates aux Pays-Bas, lutte contre la concentration des terres en République tchèque, plan de relance de l’élevage et soutien au bio en Italie…

Belgique : prairies, surfaces d’intérêt écologique et bio

Notre pays fait partie des retardataires et pourrait bien, même, être le dernier pays à envoyer son plan, ou plutôt ses plans stratégiques puisque les régions wallonne et flamande préparent chacune de leur côté leur propre projet.

Celui de la Wallonie est le plus avancé. Un accord politique qui attend d’être formellement validé a été obtenu mi-janvier. Il proposera aux agriculteurs quatre éco-régimes portant sur les prairies permanentes, le maillage écologique, la couverture des sols et les cultures favorables à l’environnement. Ce plan prévoit également une augmentation de 7 % des soutiens au bio. Mais, à ce stade, il ne fixe pas d’objectifs chiffrés en matière de climat, de maillage écologique ni de réduction des pesticides.

Espagne : redistribution des aides et séquestration du carbone

Le projet de plan stratégique de l’Espagne est parmi les plus imposants du fait de l’indépendance des régions qui disposent de beaucoup de marges de manœuvre dans l’utilisation des fonds de la Pac. Mais de grandes orientations communes se dégagent. Premièrement : la juste répartition des soutiens. L’Espagne a donc décidé d’avoir recours à toutes les mesures de redistribution à sa disposition : plafonnement des aides, dégressivité et paiements redistributifs. « Il sera particulièrement nécessaire de ne laisser personne de côté, notamment les petites et moyennes exploitations, car elles sont les plus importantes socialement et celles qui maintiennent le plus les zones rurales en vie », souligne Madrid.

Sur le volet environnemental, l’Espagne assure qu’elle consacrera 43 % du budget total de la PAC au respect des engagements et des objectifs environnementaux et climatiques de l’UE. Une dizaine d’écorégimes sont prévus sur trois grands sujets : le bien-être animal, la séquestration de carbone dans les sols et la restauration des zones humides. Ils sont proposés au niveau national et des flexibilités supplémentaires sont accordées aux régions dans le cadre des programmes de développement rural. Enfin, le dernier volet du plan espagnol concerne les investissements, l’innovation, la formation et le conseil pour répondre notamment à un des principaux défis du pays pour les années à venir : la ressource en eau.

Italie : élevage et agriculture biologique

Pour l’Italie, l’objectif de cette nouvelle PAC est clair : relancer son secteur de l’élevage et développer l’agriculture biologique. Pour soutenir le secteur de l’élevage, une part importante des ressources destinées aux éco-régimes sera consacrée au bien-être des animaux et à la réduction de l’utilisation des antimicrobiens dans l’élevage. Sur les cinq éco-régimes proposés par l’Italie, celui sur la réduction de la résistance aux antimicrobiens et le bien-être des animaux représentera 41 % des ressources prévues pour l’adoption d’éco-régimes.

Les autres éco-régimes concerneront : le désherbage des cultures arboricoles, la sauvegarde des oliviers ayant une valeur paysagère particulière, les systèmes fourragers extensifs, (pour encourager l’introduction dans les rotations de cultures légumineuses et fourragères), et enfin des mesures spécifiques en faveur des pollinisateurs. L’agriculture biologique va, elle, se voir allouer une enveloppe de 2,5 milliards  € (soit un milliard d’euros supplémentaires par rapport au dispositif actuel) au cours de la période quinquennale dans le cadre du développement rural (avec des transferts du premier vers le deuxième pilier et une part de co-financement national).

Pays-Bas : les nitrates, l’ennemi public numéro un

La coalition au pouvoir au Pays-Bas l’a déjà annoncé, elle veut fortement réduire ses émissions d’azote qui dépassent depuis des années les plafonds autorisés. Le dispositif envisagé – assorti d’un budget de 30 milliards € destiné à la réduction du cheptel et à la restauration de la nature – pourrait aboutir à une réduction du nombre d’animaux de 30 % dans le pays. Le plan stratégique néerlandais prévoit qu’une grande partie des fonds de la PAC soit consacrée « au soutien des agriculteurs qui innovent, se renouvellent et contribuent aux objectifs en matière de biodiversité, de climat, de sol, d’eau et d’air ». Les agriculteurs pourront choisir parmi une liste d’environ 25 éco-régimes largement orientés vers la protection de la biodiversité, la qualité de l’eau et de la lutte contre le changement climatique. Une évaluation intermédiaire en 2025 est prévue pour faire évoluer le dispositif si besoin, en fonction des résultats obtenus.

Écrivez au commissaire Wojciechowski !

Dans un rare exercice de démocratie directe, et alors que la transparence du processus de validation des futurs plans stratégiques de la PAC est régulièrement questionnée, le commissaire Janusz Wojciechowski a transmis l’adresse mail de son cabinet et proposé à quiconque souhaitant l’interpeller de lui adresser directement un courrier sur des questions liées à l’agriculture, notamment des avis sur les plans stratégiques nationaux, à l’adresse électronique suivante : cab-wojciechowski-contact@ec.europa.eu.

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