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La Ferme «Qui lait cru», à Berneau (Dalhem): «Pour apprendre davantage et plus rapidement»

La crise du lait de 2009 a conduit Jean-Pierre et Céline Deru-Lambert à revoir leur manière d’envisager la production laitière mais aussi l’organisation globale de leur exploitation. C’est ainsi qu’ils ont fait leurs premiers pas vers l’autonomie protéique, ont converti leur troupeau au bio, ont testé de nouvelles cultures… Une démarche d’innovation qui les a également amenés à rejoindre l’asbl Farm for Good.

Temps de lecture : 4 min

Si c’est à Berneau qu’est installée la Ferme « Qui lait cru », c’est bien à Stembert, à quelques encablures de Verviers, que Jean-Pierre Deru a débuté sa carrière d’éleveur laitier en 1995. « J’ai travaillé quelques années dans la ferme familiale. Cependant, nous ne pouvions accroître notre quota, notamment pour des raisons législatives », se souvient-il. Face à l’impossibilité de s’associer avec ses parents, une alternative doit être trouvée.

En 1999, Céline, son épouse, et lui décident de reprendre une ferme laitière en pays de Herve. « Notre objectif était de développer un très bon troupeau Holstein. En 2009, la production moyenne par vache s’élevait à 11.000 l. »

Quand une crise conduit à l’autonomie

La même année, la crise du lait vient frapper de plein fouet l’exploitation. S’ensuit une sérieuse remise en question. Dans un premier temps, le couple décide d’accroître la production laitière.

Céline et Jean-Pierre font cependant marche arrière en 2011. « Le budget nécessaire à la construction d’une nouvelle étable nous paraissait totalement démesuré… Nous étions sur le point d’entrer dans un système qui ne nous correspondait pas. Une course folle vers l’agrandissement des fermes… Mais allait-on en être plus heureux ? Je ne pense pas. »

La taille du troupeau est alors progressivement revue à la baisse, ce qui libère des surfaces. Dès ce moment, le couple s’interroge : « Comment valoriser au mieux ces parcelles, dans les conditions pédoclimatiques du pays de Herve ? ».

« Nous avons semé du froment, mais la rentabilité n’était pas au rendez-vous. Nous nous sommes alors tournés vers l’autonomie protéique », explique Jean-Pierre.

Des premiers essais sont menés avec du lupin et des pois protéagineux. Des conseils sont pris, notamment auprès de Biowallonie, afin de conduire aux mieux ces nouvelles cultures. À la récolte, les résultats obtenus étaient tout à fait satisfaisants.

« Si l’autonomie protéique était atteignable, pourquoi ne pas convertir la ferme à l’agriculture biologique ? Nous avons donc franchi le pas en 2015. »

Une autre décision importante est prise en 2017 : une partie du lait sera désormais transformée à la ferme en beurre, yaourt, fromage…, le tout commercialisé sur place ou via des magasins de proximité. Les aléas de la vie ont néanmoins mis cette activité entre parenthèses voici quelques mois. En guise de compensation, le nombre de vaches traites est passé d’une quinzaine à une soixantaine.

Les céréales anciennes comme porte d’entrée dans l’asbl

En parallèle de ces importants changements, le panel d’espèces cultivées s’est petit à petit élargi en vue de constituer une rotation complète. Aujourd’hui, la ferme s’étend sur 140 ha de prairies et cultures diverses : féverole, mélange orge-pois, maïs, tournesol, lentille, moutarde, cameline et céréales panifiables. C’est d’ailleurs par le biais de ces dernières qu’ont eu lieu les premiers contacts entre Jean-Pierre et Céline et l’asbl Farm for Good.

« En tant qu’administrateur de la coopérative Histoire d’un grain, installée à Soumagne, j’étais à la recherche de céréales anciennes. J’ai ainsi rencontré Clotilde de Montpellier, co-fondatrice de l’asbl, qui travaillait déjà sur ce type de variétés. »

De discussions en discussions, la ferme « Qui lait cru » rejoint Farm for Good en 2021. « Nous étions éleveurs et non cultivateurs. Intégrer un réseau d’agriculteurs nous permet d’apprendre davantage et plus rapidement. Nous pouvons faire des choix techniques avec plus de facilité car tout un chacun apprend des erreurs et réussites des autres. »

Quant aux résultats obtenus grâce à la boussole ABC développée par l’asbl (lire en pages précédentes), ils constituent une aide dans la gestion de la ferme. « À titre d’exemple, nous savions que nous devons travailler sur le taux de couverture du sol de nos parcelles. L’indicateur le confirme et nous nous y attèlerons durant les prochaines années. »

En intégrant Farm for Good, Jean-Pierre et Céline prennent également part au développement de filière commune. « Cela permet d’écouler nos productions et d’innover en incluant de nouvelles cultures dans la rotation. »

Et de conclure : « Mutualiser les outils et connaissances ne peut qu’être bénéfique au développement de nos fermes. C’est souvent un coup d’accélérateur pour nos projets ».

J. Vandegoor

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