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N’exportons pas nos problèmes: ici et ailleurs, les éleveurs laitiers boivent la tasse!

Trois ONG belges et des représentants d’éleveurs européens et ouest-africains lancent une campagne de sensibilisation pour une politique du lait juste, efficace et durable.

Temps de lecture : 4 min

A quelques semaines des élections en Belgique, une coalition composée de SOS Faim, Oxfam, Vétérinaires Sans Frontières, l’European Milk Board (EMB) représentant les éleveurs européens et la campagne « Mon lait est local » représentant les éleveurs ouest-africains dénonce la surproduction de lait dans l’Union européenne qui nuit gravement aux éleveurs ici et là-bas. Une semaine d’actions est organisée du 8 au 12 avril, avec, le 10 avril, une action symbolique des éleveurs et la signature d’une déclaration commune devant les institutions européennes. Ensemble, ils réclament la mise en place d’outils assurant un revenu décent aux éleveurs, de relations commerciales équitables entre l’Union européenne et l’Afrique et d’une politique européenne de développement cohérente.

Depuis de longues années, le secteur laitier européen est en surproduction. En supprimant les quotas laitiers sans mettre à disposition des instruments de crise et en orientant toujours plus la production agricole vers la grande exportation, l’Union européenne privilégie les intérêts de l’agro-industrie au détriment de ceux des éleveurs européens et ouest-africains.

D’Europe ou d’Afrique, les éleveurs ne peuvent plus vivre de leur métier

La surproduction génère en effet une chute des prix payés aux producteurs européens, qui ne peuvent plus vivre dignement de leur travail. Aujourd’hui, un producteur belge vend son lait 34 centimes le litre quand il devrait être de 45 centimes pour, a minima, couvrir les coûts de production.

Quant aux éleveurs ouest-africains, ils doivent faire face à la concurrence déloyale du lait en poudre européen. Car le prix de ce lait importé est rendu artificiellement bas par deux mécanismes cumulés : d’une part, les subventions versées par la Politique agricole commune (PAC) constituent une forme masquée d’aide à l’exportation, les éleveurs ouest-africains ne bénéficiant pas d’un soutien comparable. D’autre part, la pratique du réengraissage de la poudre de lait avec de l’huile de palme bon marché permet de proposer aux consommateurs un produit 30 % moins cher que le lait produit localement. Alors même que cette filière laitière ouest-africaine cherche justement à se renforcer.

Un réengraissage à l’huile de palme désastreux

A noter que cette pratique de l’écrémage puis du réengraissage a été imaginée par des entreprises européennes pour répondre à la demande croissante en beurre puis écouler les stocks de lait écrémé qui en résultent. Elle renforce ainsi la demande d’huile de palme dont la production est désastreuse pour l’environnement et la consommation moins bénéfique d’un point de vue nutritif.

Les organisateurs ont donc établi une liste de recommandations, à savoir:

– interdire toute forme de dumping de produits laitiers et de mélanges réengraissés de matières grasses végétales sur les marchés africains;

– créer les conditions permettant aux producteurs européens de bénéficier de prix couvrant les coûts de production;

– adopter des mesures de gestion de l’offre de la production laitière européenne en cas de crise pour éviter la surproduction structurelle et conjoncturelle;

– revoir les accords et négociations commerciales entre l’Union européenne et l’Afrique;

– renforcer la transparence des marchés en élargissant le mandat de l’Observatoire du marché du lait;

– garantir la cohérence des politiques agricoles et commerciales européennes en faveur du développement durable;

– appuyer les initiatives existantes portées par les producteurs et productrices de lait.

Du 8 au 10 avril: les «72h du lait»

Au programme de cette semaine de sensibilisation:

– le 8 avril, de 9h à 12h30, une conférence sur le «Le lait local en Afrique de l’Ouest : quel soutien pour quelle filière ? » se tiendra au conseil économique et social européen;

– le 10 avril, une action médiatique et de mobilisation se tiendra à la petite rue de la Loi, entre le Rond-point Robert Schuman et l’Avenue de la Joyeuse entrée. une action publique symbolique se tiendra entre 11 et 13 h devant les institutions européennes en présence d’éleveurs européens et ouest-africains, distribution de crêpes et signature d’une déclaration commune.

– le 11 avril, place au Ciné-club Alimenterre (au Cinéma Galeries) avec la projection du film lauréat du Prix Alimenterre 2018 « La planète Lait », suivie d’une discussion avec Korotoumou Gariko, membre de l’Union Nationale des Mini-Laiteries du Burkina et de la Confédération Paysanne du Faso,et Guy Francq président de la MIG;

le 12 avril, un lunch-conférence « Contribuer aux Objectifs du Développement Durable par la promotion du lait local en Afrique d l’Ouest » sera organisé à l’Infopoint de la Commission européenne.

Notons que du 9 au 12 avril, des délégations européennes et ouest-africaines rencontreront des autorités politiques belges et européennes pour porter leurs recommandations.

Davantage d’infos sur www.nexportonspasnosproblemes.org .

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