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Une nouvelle législation pour protéger les fournisseurs de produits agroalimentaires

Dans le Moniteur Belge du 15 décembre dernier, une loi sur les pratiques commerciales déloyales dans les relations interentreprises au sein de la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire a été publiée. Cette loi transpose la directive (UE) 2019/633 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 et modifie le Code de droit économique.

Temps de lecture : 4 min

Le 18 novembre 2021, le projet de loi transposant la directive (UE) 2019/633 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur les pratiques commerciales déloyales dans les relations interentreprises au sein de la chaîne d’approvisionnement agricole et alimentaire et modifiant le Code de droit économique a été adopté par la Chambre des représentants.

La directive est un acte juridique européen pris par le Conseil de l’Union européenne avec le Parlement européen ou seul dans certains les cas. Elle lie les États destinataires de la directive quant à l’objectif à atteindre, mais leur laisse le choix des moyens et de la forme pour l’atteindre dans les délais qu’elle définit.

La directive 2019/633 vise à protéger les fournisseurs de produits agroalimentaires contre les pratiques commerciales déloyales qui leur sont imposées par leurs acheteurs. Seuls les fournisseurs ayant un chiffre d’affaires annuel inférieur à 350 millions d’euros seront protégés (à l’exception des coopératives agricoles qui sont toutes protégées).

Il s’agit de mettre fin aux pratiques commerciales déloyales à l’encontre des petits acteurs de la production alimentaire.

Les pratiques commerciales déloyales interdites

La nouvelle loi contient une liste de pratiques commerciales déloyales interdites en toutes circonstances.

Tout d’abord, un délai de paiement maximal de trente jours est introduit pour les produits agricoles et alimentaires périssables et non périssables. À l’opposé, les délais d’annulation inférieurs à trente jours pour les produits agricoles et alimentaires sont interdits, tout comme la modification unilatérale des conditions essentielles du contrat de fourniture. Une autre interdiction vise les demandes de paiements qui ne sont pas en lien avec la vente de produits agricoles et alimentaires du fournisseur.

D’autres situations, qui sont en tout cas présumées déloyales et donc interdites, sont reprises dans la loi :

– l’acheteur demande au fournisseur qu’il paie pour la détérioration ou la perte de produits agricoles et alimentaires ou pour la détérioration et la perte qui se produit dans les locaux de l’acheteur ou après le transfert de propriété à l’acheteur, lorsque cette détérioration ou cette perte ne résulte pas de la négligence ou de la faute du fournisseur ;

– l’acheteur refuse de confirmer par écrit les conditions d’un accord de fourniture entre l’acheteur et le fournisseur au sujet desquelles le fournisseur a demandé une confirmation écrite ;

– l’acheteur obtient, utilise ou divulgue de façon illicite des secrets d’affaires du fournisseur ;

– l’acheteur menace de procéder ou procède à des actions de représailles commerciales à l’encontre du fournisseur si celui-ci exerce ses droits contractuels ou légaux, y compris en déposant une plainte auprès des autorités d’application ou en coopérant avec les autorités d’application au cours d’une enquête ;

– l’acheteur demande une compensation au fournisseur pour le coût induit par l’examen des plaintes des clients en lien avec la vente des produits du fournisseur malgré l’absence de négligence ou de faute de la part du fournisseur.

Interdites… mais possibles

La nouvelle loi prévoit aussi une liste de pratiques commerciales présumées déloyales et interdites, à moins qu’elles n’aient été préalablement convenues en termes clairs et dépourvus d’ambiguïté dans l’accord de fourniture. Il s’agit des pratiques du marché suivantes :

– l’acheteur renvoie des produits agricoles et alimentaires invendus au fournisseur sans payer pour ces invendus ou sans payer pour l’élimination de ces produits ;

– le fournisseur est tenu d’effectuer un paiement pour que ses produits agricoles et alimentaires soient stockés, exposés ou référencés ou mis à disposition sur le marché ;

– l’acheteur demande au fournisseur qu’il supporte tout ou partie des coûts liés à toutes remises sur les produits agricoles et alimentaires qui sont vendus par l’acheteur dans le cadre d’actions promotionnelles ;

– l’acheteur demande au fournisseur qu’il paie pour la publicité faite par l’acheteur pour les produits agricoles et alimentaires ;

– l’acheteur demande au fournisseur qu’il paie pour la commercialisation de produits agricoles et alimentaires par l’acheteur ;

– l’acheteur fait payer par le fournisseur le personnel chargé d’aménager les locaux utilisés pour la vente des produits de ce fournisseur.

Déjà d’application

La loi du 28 novembre 2021 est entrée en vigueur le 25 décembre 2021. Néanmoins, suivant la directive sur les pratiques commerciales déloyales dans la chaîne agroalimentaire, les dispositions nationales transposant la directive européenne devaient entrer en vigueur le 1er novembre 2021. La Belgique était donc en retard…

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