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Des enclos-exclos pour objectiver l’équilibre forêt-grand gibier

Il y a peu, un enclos-exclos a été mis en place à Serinchamps (Ciney, Namur), en présence du ministre wallon de l’Agriculture, de la Nature et de la Ruralité, René Collin. Ce dispositif, implanté cet été par la Société Royale Forestière de Belgique (SRFB) dans plus de cent forêts privées wallonnes, a pour objectif de mesurer la pression du gibier sur la régénération naturelle des forêts de Wallonie.

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La Société Royale Forestière de Belgique (SRFB) est une asbl visant à la promotion et la protection des forêts, ainsi que sa gestion responsable. Cet été, elle a implanté plus de cent enclos-exclos dans les forêts privées wallonnes afin de mesurer la pression du gibier sur la régénération naturelle de nos forêts.

Quelle forêt pour demain?

90.000 Wallons sont propriétaires de parcelles boisées. Leur but : gérer de manière durable en veillant à conserver la multifonctionnalité de la forêt. Or ces dernières décennies, l’augmentation des populations de grand gibier est souvent pointée du doigt pour leur impact négatif sur la forêt, provoquant un déséquilibre entre les différentes fonctions économiques, écologiques et sociales que remplissent les forêts.

Mais peut-on réellement accuser le grand gibier de tous les maux ? Quel impact a-t-il réellement sur la régénération de nos forêts ? La méthode sylvicole ne doit-elle pas elle aussi être remise en cause Et les changements climatiques ? Pour pouvoir répondre à ces questions, il faut d’abord avoir des données objectives.

Un projet innovant se mettant en place en forêt publique avec l’appui scientifique du Département d’Étude du Milieu Naturel et Agricole (DEMNA), il semblait opportun à la SRFB ainsi qu’à NTF (Nature Terres et Forêts, association représentant les propriétaires ruraux) d’intégrer la forêt privée à ce projet. « Offrir aux propriétaires privés, qui représentent la moitié des forêts en Wallonie, l’opportunité

d’objectiver la pression du gibier, nous semblait capital », explique Isaline de Wilde chargée du projet au sein de la SRFB. « Nous voulions que ce projet soit aussi celui de tous les acteurs et partenaires de la forêt et de la chasse, de manière à construire collectivement des solutions durables de gestion intégrée de la faune sauvage. Nous avons particulièrement apprécié le support et la collaboration avec le Département de l’Étude du milieu naturel et agricole (DEMNA) et le Département Nature et Forêts (DNF) ».

Un réseau d’enclos-exclos

Propriétaires, chasseurs, scientifiques et volontaires se sont associés pour mettre en place des enclos-exclos qui permettront d’objectiver la pression du gibier sur la régénération naturelle. Ces dispositifs scientifiques sont placés dans des zones de la forêt favorables à la régénération naturelle, où la présence du cerf est particulièrement abondante. Ils permettent de comparer la végétation d’une zone clôturée inaccessible au gibier – l’enclos de 3 mètres sur 3 –, à celle de deux zones non clôturées et de même surface – les exclos.

Chaque été pendant 6 ans, la végétation y sera t inventoriée et mesurée. Les résultats seront encodés auprès du DEMNA, en même temps que les résultats obtenus en forêt publique.

Quel équilibre forêt-gibier ?

Le grand gibier – cerf, chevreuil, sanglier, daim, mouflon – a bien sûr un impact sur la végétation, soit parce qu’il la mange, soit parce qu’il s’y frotte ou remue la terre. Il a sa place et son rôle dans l’écosystème forestier. En situation d’équilibre faune-flore, la forêt est capable de cicatriser et supporter ces impacts. La question est donc de savoir quand cette pression est acceptable et quand elle compromet l’avenir de la forêt.b Un propriétaire forestier a peu de points de comparaison et son appréciation est souvent subjective. S’il est optimiste, il trouvera qu’il a peu de dégâts même s’il en a en réalité beaucoup. Et inversement, un propriétaire pessimiste ayant quelques traces de présence de gibier pensera être victime d’un déséquilibre.

Il est donc primordial de pouvoir objectiver la pression du gibier.

Par ailleurs, il se peut que le manque de régénération ait une autre origine : sols inadéquats pour l’essence, manque de lumière, tassement du sol, ou encore climat, maladies et ravageurs… L’étude menée grâce à ces enclos-exclos permettra d’y voir plus clair.

Une équipe de bénévoles

Plus de vingt « forestiers volontaires » ont été formés par le DEMNA et la SRFB. Ils ont rencontré les propriétaires, fait le relevé de la végétation, mis en place les dispositifs… et cela bénévolement. Leurs profils ? Étudiants et professeurs de sylviculture, propriétaires, experts ou amoureux des forêts. Leurs motivations ? « Je ne peux qu’avoir de l’espoir devant ce projet » dit Thibault, jeune titulaire d’un permis de chasse et nouvellement gradué en sylviculture. David complète : « L’action menée ici permet d’apporter un aspect scientifique et objectif dans un débat souvent passionnel. Cela me paraît très constructif ».

Certification PEFC

La SRFB est porteur de la certification forestière PEFC (Programme de Reconnaissance de Systèmes de Certification Forestière) pour la forêt privée en Belgique. À ce titre, elle met en place des outils qui permettent aux propriétaires certifiés de respecter la charte PEFC, dont l’équilibre forêt-gibier est un des points : « Je m’engage à objectiver la pression du gibier par les moyens les plus appropriés pour mesurer l’adéquation des populations en fonction de l’écosystème. » Chasseurs et sylviculteurs ont leur part de responsabilité dans cet équilibre : les chasseurs en régulant la quantité de gibier par le nombre de tirs et les sylviculteurs en améliorant la capacité d’accueil de la faune sauvage dans sa forêt.

La SRFB a choisi de travailler en partenariat avec le Royal Saint-Hubert Club de Belgique, en informant et en invitant les chasseurs à être présents au moment de la mise en place des dispositifs.

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