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Marché international du porc: les prix maintenus sous pression

Le marché porcin européen fait face à plusieurs défis : politique américaine protectionniste, peste porcine africaine, hausse de la production… Ce qui, d’une part, affecte les relations commerciales qu’entretient l’Europe avec ses partenaires et, d’autre part, rend les cours incertains.

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La Commission européenne, et plus précisément sa Direction générale de l’Agriculture, vient de publier ses prévisions automnales à court terme pour les marchés agricoles. Basées sur les dernières informations disponibles, Elles donnent une idée de l’évolution future des marchés européens pour diverses spéculations, dont la viande de porc.

Troupeau en baisse, viande en hausse

Les experts reviennent en premier lieu sur la taille du cheptel porcin européen. Après la hausse observée en 2017, en raison d’une remontée des prix amorcée mi-2016, cette tendance s’est déjà inversée en 2018. En effet, les prix sont repartis à la baisse, entraînant une réduction de la taille des troupeaux porcins dans les principaux pays producteurs.

On a ainsi vu le nombre de truie diminuer drastiquement en Allemagne (-47.000 têtes), Roumanie (-70.000 ) et Pologne (-37.000). Ce dernier cas est par ailleurs interpellant, étant donné que le nombre de truies polonaises n’avait jamais cessé d’augmenter depuis 2015. Malgré la croissance enregistrée en Espagne (+57.000) et en Italie (+26.000), le cheptel européen se contracte légèrement (-1 %).

Néanmoins, le tassement du nombre d’animaux n’a pas encore d’impact sur la production de viande porcine. Au premier semestre 2018, celle-ci a d’ailleurs augmenté de 3,7 %, sous l’effet de fortes hausses en Espagne (+8 %), en Pologne (+9 %), aux Pays-Bas (+6 %) et au Danemark (+4 %). D’ici à la fin de l’année, cette croissance devrait toutefois être moindre, fixant la production totale 2018 à 24,03 millions de tonnes (Mt) contre 23,67 Mt en 2017, soit une hausse de 1,5 %.

Pour 2019, la production devrait baisser d’environ 1 % pour s’établir à 23,79 Mt en raison de la réduction de la taille des troupeaux.

Sévères incertitudes commerciales

Les flux commerciaux porcins devraient quelque peu être modifiés au cours de ce second semestre 2018. D’une part, en raison de tensions commerciales. D’autre part, en raison de la peste porcine africaine qui se propage rapidement en Chine, principal producteur et importateur à l’échelle mondiale, et touche plusieurs États européens, dont la Belgique, l’Estonie, la République Tchèque, la Hongrie et la Roumanie. À noter que seul les élevages roumains ont été touchés ; la maladie restant cantonnée à la faune sauvage dans les autres pays.

Concernant la Belgique en particulier, pas moins de 13 pays ont fait le choix de suspendre leurs importations de porcs, parmi lesquels d’importants partenaires, à savoir la Chine, le Japon, la Corée du Sud, les Philippines et l’Australie. Par conséquent, notre pays doit actuellement trouver de nouveaux partenaires commerciaux.

Quant aux tensions commerciales, elles résultent principalement de la politique menée actuellement aux États-Unis. En effet, Donald Trump et son administration ont imposé des droits de douane sur l’acier provenant de Chine, en mars, et d’Europe et du Mexique, en juin. En représailles, la Chine a augmenté les droits de douane sur le porc américain de 25 % en avril et de 25 % supplémentaires en juillet. Le Mexique a quant à lui augmenté ces mêmes droits de 10 % en juin, pour finalement les porter à 20 % en juillet.

Ces mesures n’ont pas été sans conséquences pour l’économie américaine. Alors que les exportations porcines totales des États-Unis ont augmenté de 9 % sur la période janvier-juillet 2018, les livraisons à destination de la Chine se sont fortement tassées (-17 %) et celles à destination du Mexique légèrement (-1 %).

La Chine, notre premier client

De son côté, l’Europe a vu dans cette situation une opportunité et a commencé à exporter de la viande porcine congelée vers le Mexique. Toutefois, les volumes vendus sont encore faibles. En revanche, en raison de l’embargo russe prolongé jusque fin 2019, la Brésil se tourne davantage vers la Chine où il concurrence directement les relations commerciales Europe-Chine.

Toutefois, la Chine reste la principale destination du porc européen, représentant pas moins de 35 % du volume exporté depuis le Vieux Continent entre janvier et juillet 2018. En seconde position, mais loin derrière, on retrouve le Japon (12 %). Sur la période susmentionnée, les livraisons à destination de la Chine étaient évaluées à 110.000 t/mois, en baisse de 2 % par rapport à 2017.

Les exportations vers Hong-Kong ont quant à elle chuté de 36 %, bien qu’elles aient été compensées par une hausse des exportations vers d’autres pays tels que la Corée du Sud (+ 16 %), les Philippines (+11 %), les États-Unis (+14 %), l’Ukraine (+34 %) et le Vietnam (+33 %).

Dans l’ensemble, les exportations européennes totales ont augmenté de 1 %, avec une croissance de 3 % pour la viande porcine et une baisse de 4 % pour les abats. D’ici à la fin de l’année, les exportations de viande devraient avoir augmenté de 2,5 % par rapport à 2017, pour s’établir à 2,63 Mt contre 2,57 Mt un an plus tôt.

Pour 2019, les estimations sont plus pessimistes. L’Europe s’attend à voir ses exportations viandeuses diminuer de 5 %, pour s’établir à 2,5 Mt.

Forte pression sur les prix

Entre janvier et août 2018, les prix européens de la viande de porc affichaient un recul de 7 % par rapport à la moyenne des quatre dernières années, demeurant aux environs de 145 €/100 kg entre mars et la mi-août. À ce moment, ils ont connu une augmentation suite à un resserrement de l’offre, résultant lui-même de la sécheresse estivale et du ralentissement de la croissance qu’elle a engendré chez les porcs.

Néanmoins, les prix resteront sous pression, au vu de la hausse de la production attendue d’ici à la fin de l’année. L’évolution des relations commerciales mondiales pourrait également les influencer, positivement ou négativement. À cela s’ajoute encore une pression supplémentaire résultant des prix particulièrement bas pratiqués, à l’exportation, par les principaux concurrents de l’Europe que sont les États-Unis, le Brésil et le Canada.

Le prix des porcelets a quant à lui oscillé autour de la moyenne de ces quatre dernières années jusqu’en mai, moment où il a enregistré une importante baisse saisonnière pour atteindre un niveau bien inférieur à la moyenne. Cela s’explique en partie par les faibles prix de la viande porcine. Découragés, les engraisseurs n’ont pas renouvelé leur cheptel. Ce n’est qu’à la fin de l’été que cette dépréciation s’est arrêtée, à environ 37 € (soit 23 % de moins qu’en 2017).

Enfin, la consommation de viande de porc devrait s’établir, pour 2018, à 32,5 kg/habitant (en hausse de 1,2 % par rapport à 2017) pour ensuite rediminuer en 2019 (-0,7 %, 32,3 kg/habitant).

J.V.

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