À la Ferme du Vallon à Nivelles: des fruits, oui, mais jamais sans les légumes!

Le métier, Jean-Marc est tombé dedans de manière un peu cocasse alors qu’il allait s’inscrire à l’école avec son papa : « Nous sommes allés à Gembloux pour m’inscrire à l’école agriculture et nous nous sommes retrouvés à l’école d’horticulture. À l’époque, notre petite ferme familiale était à un tournant, si je souhaitais continuer dans nos spéculations de grandes cultures et élevage, nous devions clairement envisager l’achat de quotas laitier et betteravier. Après réflexion, nous nous sommes dit que ce secteur pouvait tout à fait convenir à notre type d’exploitation avec des parcelles autour de la ferme. De plus, la matière me plaisait vraiment et les possibilités étaient larges. Je me suis donc engagé dans des études horticoles et j’ai peu à peu mis en place ce que j’apprenais à la maison ».

Après ses études, l’horticulteur combine durant 8 ans son travail à la ferme aux côtés de son papa et un job à l’école horticole : « Ce fut très enrichissant car, durant toutes ses années, j’ai pu bénéficier de contacts et connaissances que m’apportait mon emploi à l’école horticole. Cela m’a inspiré pour mon projet ». Vient alors le moment de succéder totalement au père : « J’ai alors fait le choix de reprendre l’exploitation et j’ai quitté mon travail à l’extérieur. J’ai l’ai alors totalement convertie à la culture maraîchère. Les débuts ont été timides car, il y a 35 ans, nous étions les premiers à nous lancer dans ce type de projet. Les banques n’étaient pas très soutenantes ».

Des fruits… et des légumes

À la ferme du Vallon, on pratique l’horticulture comestible dans sa globalité : les fruits ne vont pas sans les légumes : « L’idée est vraiment de contenter le client au maximum et de lui offrir une large gamme de produits frais et de saison. Il viendra plus facilement nous voir s’il peut acheter différents ingrédients. J’ai donc d’emblée cultivé un large panel de fruits et légumes et, les années et les modes passant, j’ai pu sélectionner et orienter mes productions vers ce qui avait le plus de succès et était le plus adéquat pour le portefeuille du client et ma rentabilité ».

Salades, courges, choux, tomates, melon, pastèque, pommes, fraises, framboises, asperges, tomates, figues, groseilles, rhubarbe, raisin, artichaut, chicons, prunes, radis, poireaux, céleri… La liste des produits proposés est longue et variée.
Salades, courges, choux, tomates, melon, pastèque, pommes, fraises, framboises, asperges, tomates, figues, groseilles, rhubarbe, raisin, artichaut, chicons, prunes, radis, poireaux, céleri… La liste des produits proposés est longue et variée. - D.J.

La production est tout d’abord réservée au magasin : « C’est là que je m’y retrouve le mieux évidemment. Il y a certains produits comme le melon ou des variétés de tomates plus particulières qui ont un rendement moyen donc, il est plus intéressant de les proposer au magasin que de les vendre via d’autres débouchés ». Néanmoins, la ferme du Vallon collabore avec pas mal de points de vente, restaurateurs et maraîchers de la région.

Jamais sans mes salades

En légumes, le point fort du producteur, ce sont les salades : « C’est ma chasse gardée, j’aime beaucoup ça et ça demande pas mal de rapidité et dextérité. La clientèle est demandeuse d’un produit frais et varié en la matière. On propose donc pas mal de sortes de salades : de la pommée rouge et verte, à l’iceberg en passant par la batavia. Autour de cela, viennent se greffer tous les ingrédients pour faire une bonne salade : les radis, petits oignons mais aussi les tomates, concombre ou aubergines. Et puis, il y aussi les traditionnels poivrons, choux dont notamment notre chou-fleur qui a reçu un coq de cristal il y a quelques années, mais aussi carottes, haricots, courgettes, potirons, pommes de terre, épinards, asperges… ».

Le dada de Jean-Marc, ce sont ses salades. Il aime en proposer une large gamme cueillie du jour, presque tout au long de l’année.
Le dada de Jean-Marc, ce sont ses salades. Il aime en proposer une large gamme cueillie du jour, presque tout au long de l’année. - Collection privée

Le chicon de pleine terre, une spécialité

Une autre fierté de Jean-Marc est son chicon de pleine terre : « La culture demande plus d’investissement qu’un chicon en hydroponie mais le produit est tout à fait différent. Nous le proposons depuis le commencement et j’y tiens beaucoup ». A la différence des chicons hydroponiques qui croissent à l’air libre et les racines dans l’eau – ce qui leur confère plus d’amertume –, les racines de chicon de Jean-Marc sont placées en forçage dès le début de l’automne : « Elles sont mises en couche. Un câble chauffe le sol à 17ºC et les racines sont posées sur une couche de tourbe gorgée d’eau. Elles sont ensuite recouvertes de terre. Le chicon pousse dans le substrat et est donc plus ferme, moins amer et moins gorgé d’eau. Ce sont des qualités appréciées par les clients, particulièrement les enfants. Après, la récolte demande pas mal de travail car, comme il n’est pas à l’air libre, le chicon doit être épluché pour être propre lors de sa présentation au client ».

Son chicon de pleine terre, l’une des fiertés de Jean-Marc.
Son chicon de pleine terre, l’une des fiertés de Jean-Marc. - D.J.

Une solide expérience en matière de fruits

L’horticulteur dispose également d’une solide expérience en culture fruitière. Des arbres fruitiers aux petits fruits, il y a tout autant de choix dans le rayon fruits que le rayon légumes.

La ferme du Vallon possède un verger depuis toujours : « c’est l’une des premières choses que j’ai mise en place. Nos pommiers basses tiges sont là depuis plus de 30 ans et sont renouvelés dès que c’est nécessaire. Au niveau des variétés, on mise sur les classiques de table appréciées par les clients et sur lesquelles ont peu aussi se permettre de leur faire plaisir mais, on a aussi quelques variétés anciennes ».

Vendues en vrac, les pommes s’associent aussi merveilleusement bien avec les autres fruits du verger ou de la ferme et donnent des jus de pommes goûtus : pomme/poire, pomme/groseille, pomme/framboise, pomme/fraise, pomme/rhubarbe et même pomme/betterave ou pomme/gingembre. « Le jus est pressé dans les installations de Maximilien Petit, des jus de pommes d’Upigny. Encore une jolie collaboration née des contacts qu’offre notre métier. Nous travaillions ensemble depuis l’installation de son premier pressoir. Grâce à nos échanges et son étude de packaging, j’ai d’ailleurs troqué les bouteilles de verre parfois lourdes et encombrantes contre des cubis de 3 litres et 1, 5 litres au format pratique et recyclable ».

Les fruits, et même de légumes, de la ferme combinent leurs saveurs au sein de délicieux jus de pommes.
Les fruits, et même de légumes, de la ferme combinent leurs saveurs au sein de délicieux jus de pommes. - D.J.

Le stockage : l’étape qui va compter dans le contexte actuel

Les poiriers du verger sont moins nombreux et pour cause, la conservation des poires à long terme nécessite des frigos permettant de les stocker à près de 1ºC : « On n’est pas équipé de la sorte, c’est pourquoi on produit un peu moins de poires. Néanmoins, nous possédons plusieurs chambres froides pour le magasin, le stockage des récoltes et une chambre spécifique pour les pommes de terre. Dans le contexte actuel, il est clair que c’est un point d’achoppement puisque ces infrastructures sont nécessaires mais énergivores. Je crois sincèrement que certains producteurs vont faire des choix dans leurs récoltes car le stockage coutera trop cher ».

Du melon depuis 15 ans

Depuis plusieurs années, les producteurs de melon se manifestent peu à peu dans les campagnes wallonnes. Pourtant, à la ferme du Vallon on en fait depuis 15 ans. « De nombreux producteurs de fraise font désormais du melon. Ceux-ci sont mis en place juste après les récoltes de fraises, sur les mêmes buttes et sont disponibles à la vente fin de l’été. Chez nous, nous faisons aussi du melon hâtif. Une partie des plantes est installée sous tunnels dès la mi-avril et les fruits sont disponibles dès juin ».

Le melon peut se développer au sol ou être palissé sur des ficelles. Il doit subir trois tailles notamment pour stimuler la production de fleurs femelles : « les premières fleurs sont des fleurs mâles mais pour avoir des fruits, il est essentiel d’avoir une fécondation des fleurs femelles. Le fait de pincer les plantes va permettre la production de ces fleurs. On place ensuite des ruchettes de bourdons dans les tunnels et ceux-ci s’occupent de la fécondation lorsqu’ils butinent ».

Une seconde production de melon prend également place après les fraisiers : « Qu’elles soient fixes ou volantes, nos serres accueillent une succession de légumes et fruits tout au long de la saison. L’espace est toujours bien occupé ».

Le melon est récolté à point, ni trop mur, ni trop dur pour pouvoir prendre facilement place dans le panier du client.
Le melon est récolté à point, ni trop mur, ni trop dur pour pouvoir prendre facilement place dans le panier du client. - Collection privée

Le melon est récolté à point, ni trop mûr, ni trop dur pour pouvoir prendre facilement place dans le panier du client : « Quand ça commence à sentir dans la serre, il faut intervenir. On repère les fruits dont le pédoncule commence à jaunir et se craqueler. Ils doivent être un peu mous. Sauf rares exceptions, nos melons sont exclusivement vendus au magasin de la ferme. Avec une production de 5 melons par plante, on ne peut pas parler de rentabilité extraordinaire, autant donc le vendre correctement au magasin. C’est en général le cas pour une grande majorité des fruits et légumes de serre ».

Des journées bien remplies

Les légumes feuilles sont arrosés par aspersion, les fruits et légumes de serres sont alimentés en goutte à goutte. La récolte commence toujours tôt le matin avec une priorité pour les légumes feuilles. Les après-midi sont plutôt consacrés au nettoyage des cultures et aux plantations. « J’adore mon métier mais il n’en reste pas moins éprouvant. Pour les plantations, nous avons la possibilité de nous équiper mais les récoltes se feront toujours manuellement. Ça fait quand même une dizaine d’ha de fruits et légumes qui passent entre nos mains chaque année. En fonction de la saison, je peux compter sur une bonne équipe de 5 à 8 personnes pour assurer sur tous les fronts ».

Vers un retour aux fruits et légumes traditionnels ?

La clientèle de la Ferme du Vallon aime les beaux produits mais le producteur a néanmoins déjà remarqué des évolutions dans les comportements d’achat vu la crise : « J’ai l’intuition que les consommateurs vont se rediriger vers des valeurs refuges, des légumes et fruits plus traditionnels, anciens et de saison. Je vends par exemple plus d’oignons et choux. Si ça continue comme ça, il ne sera plus question de compter sur des légumes produits dans des serres chauffées et illuminées ou venant du fin fond du monde. On pourra aussi repenser à utiliser son congélateur pour la réalisation de recettes de soupes, compotes et confitures. Avec les fruits et légumes, les possibilités sont multiples et agréables à mettre en œuvre ».

D. Jaunard

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