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Les ruminants, des affameurs de la population...vraiment?

« Les ruminants, sont des affameurs de la population ! Ils rentrent en concurrence avec l’alimentation des êtres humains ». Voici l’une des critiques dont fait régulièrement l’objet l’élevage de ruminants et qui a donné lieu notamment au véganisme, un mouvement qui prend de l’ampleur et que le Professeur Frédéric Rollin (ULg) compare ni plus ni moins à une secte ! Et de remettre l’église au milieu du village sur base d’arguments purement scientifiques.

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De tels arguments sont fallacieux et émanent souvent de personnes mal informées, pleines de préjugés, explique le Professeur Rollin. Il voit plutôt les ruminants comme des bienfaiteurs de l’humanité ! Il s’en explique…

Une flore bénéfique

« Les bovins sont des travailleurs de première force. Ils ruminent 12 à 14 h par jour. Grâce à la flore de leur rumen, ils transforment des protéines végétales et des hydrates de carbone complètement indigestes pour l’homme en protéines animales de meilleure qualité.Car si nous voulions nous nourrir uniquement de protéines végétales, nous devrions en consommer 40 % en plus pour couvrir nos besoins en acides aminés essentiels », explique-t-il.

« Grâce à l’activité de la flore microbienne, des protéines microbiennes de haute qualité sont produites. On les retrouve dans la viande, le lait… Et si cdertains consommateurs privilégient le lait à la viande, nombre d’entre eux n’ont pas conscience que pour produire du lait, il faut produire de la viande », avance l’orateur.

Les poubelles de la société

« Si d’aucuns les voient comme des affameurs, je les vois plutôt comme la poubelle de notre société ! », affirme M. Rollin. « Ils s’alimentent de tout le co-produits du secteur agroalimentaire dont ce dernier ne sait rien faire. Qu’ils soient des céréales, des graines oléagineuses, des plantes à sucre, les légumes. tous les co-produits retournent dans l’alimentation des ruminants. Que ferions-nous des montagnes de pulpes, de drèches de brasserie ou de celles issues de la fabrication de bioéthanol si nous n’avions pas les ruminants pour les valoriser ? »

Et de faire le point sur les céréales. La production mondiale annuelle se monte bon an mal an à 2,5 milliards de tonnes. Le bétail (porcs et volailles compris), en consomment quant à lui 900 millions de tonnes. Une telle quantité pourrait nourrir théoriquement 3,5 milliards d’humains. Dans ces 900 millions de tonnes, 60 % sont consommés par le milliard de porcs et les 22 milliards de volailles qui sont produites annuellement sur la planète. Il ne reste donc aux ruminants que 360 millions de tonnes, souvent impropres à la consommation humaine. Et ils les valorisent bien grâce à la flore de leur rumen. Celle-ci leur permet de moins subir la toxicité des mycotoxines que les animaux de production monogastriques. Il faut ensuite voir ce qu’ils nous rendent en échange de cette production. »

La production mondiale de lait s’élevait en 2014 à 792 millions de tonnes, la production de viande à 312 millions de tonnes. Et si l’on regarde la part de viande bovine et ovine, on est à peine au quart de la quantité produite (respectivement 22 et 4 %), la plus grosse partie provenant des porcs et des volailles (respectivement 37 et 35 %).

Quand on considère l’indice de consommation alimentaire de ces différentes espèces, les ruminants ne sont pas les champions. Avec 7 kg de matière sèche ingérée (MSI) pour produire 1 kg de poids vif, ils sont bien loin derrière les porcs et des volailles qui ne demandent que 4 et 2 kg de matières sèches pour produire un kilo de viande. Mais forcément dans la ration des bovins, nombre d’aliments ne sont pas consommables par l’être humain. Il faut savoir en tenir compte !

Le Blanc-bleu tire son épingle du jeu

Il reprend les performances de taurillons B-BB à l’engrais dans de Centre de sélection bovine à Ath. « L’indice de consommation globale moyen est de 5,8 kg de MSI/kg de poids vif. Le Blanc-bleu tire donc son épingle du jeu. Il est bien meilleur que les autres races bovines de ce point de vue. Et cela peut encore s’améliorer avec la sélection génétique ! »

Si le gain quotidien moyen (GQM) depuis la naissance s’élève à 1,06 kg, le rendement carcasse est exceptionnel (69,8 %). Quant au rendement à la découpe, il avoisine 82,5 %. Pour produire un kilo d’une telle viande, l’animal a consommé 10 kg d’aliments, dont seuls 2,1 kg auraient pu être valorisés par l’humain. Notons par ailleurs que cette viande rouge est d’autant plus intéressante qu’elle est maigre et plus riche en fer, en vitamines B6 et B12 que les viandes blanches.

Un régime vegan plus écologique ?

Si l’on en croit une étude hollandaise menée en 2016 sur l’efficience du régime végan, celui-ci, appliqué à toute la population des Pays-Bas, permettrait de nourrir moins d’êtres humains à partir du territoire hollandais qu’une ration contenant 12 % de protéines animales. Les résultats seraient encore plus défavorables pour le régime végan si la simulation était faite dans un pays aux terres arides et/ou peu fertiles !! De tels pays (très pauvres en général) sont par ailleurs encore plus dépendants des protéines animales pour la survie de leur population.

Les bovins, ces pollueurs

On prétend aussi que les ruminants sont des grands pollueurs. « En réalité, ce ne sont pas les animaux qui sont concernés mais davantage les pratiques humaines. Gestion des effluents, pertes de phosphore, d’azote… Toutes ces problématiques sont liées à l’intensification des élevages, quelles que soient les espèces.

« Selon moi, de toutes les productions animales, c’est l’élevage de ruminants qui s’industrialise le plus difficilement. Et cette intensification à outrance est une pathologie de notre société. »

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