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La Chine, un marché ô combien alléchant pour l’export de notre viande bovine, mais sous fortes contraintes sanitaires

L’amélioration du niveau de vie moyen en Chine et l’évolution des comportements alimentaires sont forcément source d’espoir auprès des pays en quête de débouchés pour leur production de viande bovine. Notre pays (voir notre reportage en page 6 et 7) n’est pas en reste et poursuit des contacts en ce sens. Mais la tâche est rude sur un marché très concurrentiel et parsemé d’obstacles.

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L a viande bovine n’entre pas dans la liste des aliments emblématiques de la culture chinoise. À côté de celles du porc, du soja, du riz et du blé, la consommation de bœuf a longtemps été limitée pour des raisons économiques et sociologiques, relève une analyse approfondie réalisée par les services de l’Institut français de l’élevage.

La progression du niveau de vie, l’influence des cuisines étrangères et l’évolution de la société ont concouru à la hausse de la consommation en dehors des zones traditionnelles. Compte tenu d’une offre contrainte par de nombreuses limites, économiques comme techniques, cette dynamique de la demande a été à l’origine d’une flambée des cours et d’un afflux de viande étrangère. Longtemps restée à l’écart du marché international de la viande bovine, la Chine est devenue au milieu des années 2010 le 1er importateur mondial prenant en compte les flux illégaux, et donc le 2e consommateur derrière les États-Unis.

Muraille sanitaire

Si cette évolution est porteuse d’espoir pour les pays exportateurs de viande bovine, dont il le nôtre, les contraintes sanitaires à l’importation et les caractéristiques du marché sont bien spécifiques.

Relativement ouvert d’un point d vue tarifaire, le marché chinois de la viande bovine ne reste cependant qu’entrouvert sur le plan sanitaire : seuls 11 pays ont l’autorisation officielle d’exporter en Chine continentale. Mais une fois le sésame sanitaire obtenu, la conquête du marché reste longue et semée d’embûches.

La viande locale, largement majoritaire, reste en quasi-monopole sur les marchés de plein air et dans la restauration chinoise, tandis que la concurrence avec la viande importée prend de l’importance dans les hypermarchés, la restauration occidentale, l’e-commerce et la transformation. En outre, la compétition est rude entre les différents fournisseurs de viande étrangère déjà autorisés. Elle se joue sur les critères comme le prix, la découpe, l’alimentation des animaux, la sécurité sanitaire… la viande australienne a été détrônée en 2016 par la viande brésilienne, bien moins chère. Mais elle reste la référence en termes de qualité et de communication.

La communication demeure en effet le facteur primordial pour les viandes haut de gamme sur le marché chinois. Le choix du consommateur local repose en effet pour sa première expérience, sur le prix et sur les informations recueillies.

La viande issue des élevages belges doit ainsi prendre en compte tous ses facteurs pour percer un jour en Chine, alors que la première étape, la levée partielle de l’embargo ESB imposé depuis 2001, vient d’être franchie début mars 207 pour les viandes issues de bovins âgés de moins de trente mois.

Grande fragilité de la production locale

La production chinoise de viande bovine reste très atomisée. En effet parmi les près de 13 millions d’élevages, 96 % sont des élevages de bovins viande, mais qui produisent moins de 9 têtes par an. Ceux produisant plus de 100 têtes ne sont que 30.000, soit 0,2 % du total.

Mais la production chinoise est en crise depuis plusieurs années. La production a péniblement progressé de 7 % entre 2010 et 2015, pour se situer, officiellement, à 7 millions de tonnes équivalent carcasse. La désaffection des paysans chinois pour l’élevage bovin viandeux tient à une série d’éléments que les auteurs de cette étude résument comme suit : la faible rentabilité pour les petits producteurs, le surpâturage qui pèsent sur les effectifs, les offres d’emploi hors secteur agricole, le manque de soutien public…

L’empire du milieu, un marché potentiel monumental très attractif pour  les pays exportateurs de viande bovine... mais franchir la muraille  est un travail de longue haleine.
L’empire du milieu, un marché potentiel monumental très attractif pour les pays exportateurs de viande bovine... mais franchir la muraille est un travail de longue haleine. - M. de N.

La consommation se démocratise

Depuis une vingtaine d’années, la consommation de viande bovine augmente régulièrement, même si son niveau reste faible : en 2015, autour de 5 kg équivalent carcasse par habitant et par an. L’augmentation des revenus, le développement de la grande distribution et de la restauration occidentale, ont stimulé la consommation d’une viande qui reste encore surtout consommée en hiver et au restaurant.

Et si ladite viande conquiert sans cesse de nouveaux consommateurs, de nombreux chinois hésitent encore à passer à l’acte ou limitent la fréquence de leurs achats. Le 1er frein reste son prix particulièrement élevé. La demande croissante en viande bovine et la réponse limitée de la production locale ont fortement tiré les prix vers le haut. Pas étonnant qu’elle soit la viande la plus chère en Chine. La difficulté à cuisiner cette viande (pas dans la tradition culinaire), ainsi que le goût et l’odeur sont les autres freins à sa consommation.

Les importations, un phénomène récent

L’envolée de son prix a été à l’origine d’une forte hausse des importations légales, avec pour objectif de satisfaire la demande et de freiner la hausse des cours.

L’approvisionnement étranger semble, comme pour le secteur laitier, constituer une voie incontournable, étant donné les difficultés économiques et sanitaires de la filière. Les importations chinoises représentent plus de 20 % de la consommation chinoise. Elles sont estimées à près de 1,8 million de tonnes équivalent carcasse en 2016, en hausse de 10 % sur 2015. Cette progression fait suite à un recul enregistré en 2015, en grande partie imputable au renforcement des contrôles aux frontières du Vietnam et de Hong Kong dans le but de lutter contre les flux illégaux. Les scandales à répétition liés à la de la viande avariée importée ont poussé les autorités à prendre des mesures.

L’inde est le premier fournisseur de la Chine, même si cette viande est restée officiellement interdite dans le pays jusqu’il y a encore quelques mois. Depuis cette année, les autorités sanitaires chinoises ont agréé 14 entreprises indiennes qui peuvent exporter directement en Chine continentale.

En comptant les flux entrant à Hong-Kong, le Brésil est le deuxième plus gros fournisseur grâce à ses prix bas, devant l’Australie.

Au total, les flux légaux entrant en Chine continentale ne comptaient que pour un peu plus de 40 % des volumes (723.000 tec). Ils sont composés à 99 % de viande congelée, majoritairement des pièces désossées. En ce qui concerne les 1 % de viande réfrigérée, seule l’Australie était le fournisseur agréé jusque fin 2016.

L’attrait de la viande importée s’explique par la sécurité sanitaire supposée mais également par son prix. La viande congelée désossée arrive dans les ports de Chine continentale au prix moyen de 4,6 $/kg et en affiche 6 une fois les droits de douane et la TVA appliqués. Un prix de vente presque toujours inférieur à celui de la viande fraîche locale, et ce, en considérant les coûts de transports et les marges des intermédiaires.

Enfin le secteur commence timidement à se lancer dans les investissements à l’étranger en vue de sécuriser son approvisionnement mais également de trouver de la viande moins chère et de meilleure qualité. L’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’Argentine… sont les pays ciblés en priorité.

Barrières sanitaires

Les droits de douane, compris entre 12 et 15 % selon les lignes tarifaires, ne sont pas un réel obstacle à l’importation de viande bovine en Chine. Mais de nombreux pays qui souhaiteraient pouvoir vendre leur viande bovine sur ce marché en sont empêchés pour des raisons sanitaires. Les Etats-Unis et les pays européens (hormis la Hongrie) ne peuvent toujours pas expédier de la viande en Chine continentale, depuis l’embargo décidé au tournant des années 2000 à la suite de l’annonce des cas d’ESB.

D’après un Dossier Economie de l'Elevage (Idele)

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