Organisée tous les deux ans à Hanovre par la société allemande d’agriculture, Agritechnica est un important lieu d’innovation en matière de machinisme agricole. Souvent, les plus grands constructeurs y dévoilent des engins « futuristes ».
Si les concepts présentés voient rarement le jour en l’état, il n’est pas inhabituel que certains des éléments qu’ils intègrent se retrouvent sur des tracteurs commercialisés quelques années plus tard. Les propositions vues cette année peuvent ainsi nous éclairer sur les différents dispositifs que l’on retrouvera, dans un futur plus ou moins proche, sur les tracteurs.
Avec le « Konzept », Steyr mise sur l’hybride
Le constructeur autrichien a été le premier à ouvrir le bal en dévoilant le « Konzept », un projet au design futuriste mené en collaboration avec le motoriste FPT Industrial.
Ce concept repose sur une traction électrique hybride modulaire composée d’un moteur diesel 4 cylindres « classique », d’un générateur et de quatre moteurs électriques, soit un par roue. Ces derniers peuvent être commandés séparément en vue de fournir l’énergie là où elle est nécessaire. Ils peuvent également être utilisés seuls, en étant alimentés par une batterie plutôt que par le générateur. Un cinquième moteur électrique assure quant à lui l’alimentation de la prise de force.
Le passage en mode « full » électrique vise particulièrement les éleveurs : avec une autonomie d’une heure, ils auraient l’opportunité de travailler dans les étables tout en réduisant drastiquement les émissions de polluants nuisibles à leur troupeau.
L’architecture du véhicule permet de concrétiser des solutions intelligentes, comme la traction intégrale ou un concept de suspension avancée. Le but : accroître le confort de conduite et les possibilités d’utilisation du tracteur. L’électricité permet aussi de se passer de la transmission mécanique et de composants hydrauliques dans la chaîne cinématique. Les pertes de puissance et d’énergie sont ainsi réduites.
Les moteurs électriques présentent un autre avantage, à savoir la possibilité de récupérer et de stocker l’énergie, par exemple dans les descentes. Il est aussi possible de les charger par l’intermédiaire d’une prise.
Avec le « Konzept », Steyr devient le premier tractoriste à avancer sur l’hybridation diesel/électricité des tracteurs.
Autonome et électrique, le pari de John Deere
De son côté, John Deere a notamment travaillé sur une transmission à variation continue à entraînement électromécanique qui devrait être prochainement disponible sur les modèles 8R (lire notre article consacré aux épis d’or et d’argent). Mais le constructeur américain ne s’est pas arrêté là ! Il s’est aussi penché sur un tracteur électrique autonome.

Cet engin consiste en une unité d’entraînement électrique très compacte pouvant être rechargée à la ferme, ce qui s’avère intéressant si celle-ci est dotée d’éoliennes ou d’une unité de biométhanisation. Il développe une puissance totale de 500 kW et peut être équipé de roues ou de chenilles. Un lestage flexible de 5 à 15 t est possible, selon l’application.
Grâce à l’entraînement électrique, les émissions de particules et de CO2 sont réduites à néant. De même, les niveaux sonores sont extrêmement bas. Selon le constructeur, ce modèle présente une faible usure et des coûts d’entretien réduit.
MF Next : design futuriste, joysticks et écrans
De son côté, Massey Ferguson a dévoilé sa vision du futur sous la forme de son concept MF Next dont le design rend hommage au 50e anniversaire du premier pas de l’homme sur la Lune.
Ce tracteur fait la part belle aux nouvelles technologies. On y retrouve ainsi des systèmes de contrôle simplifié des outils et, grâce à un scanner et divers capteurs, de modulation des intrants. Les nombreuses données récoltées par les capteurs (taux d’humidité, taux de matière organique…) peuvent être utilisées non seulement pour la modulation de dose, mais aussi pour la coupure de tronçon. Cela permet d’adapter le réglage des outils aux conditions rencontrées.
De nouvelles applications « maison » font leur apparition sur ce concept. Le MF Guide dirige le tracteur automatiquement, et le MF Task Doc fourni les données nécessaires à la réalisation d’une cartographie précise des opérations en transférant automatiquement l’ensemble des informations à la ferme via la télémétrie MF Connect. Dans le même temps, les capteurs embarqués peuvent également être utilisés pour ajuster d’autres systèmes du tracteur, de l’amélioration de réglages du contrôle d’effort à l’adaptation automatique de la suspension de cabine ou du siège, par exemple.

Partenaire du projet, Trelleborg présente une nouvelle génération de pneumatiques sans carbone et avec le contrôle du gonflage « Ctis+ ». Ce dispositif ajuste automatiquement la pression des pneus pour répondre aux changements de conditions et ainsi optimiser la traction et réduire le tassement des sols.
En cabine, le volant est remplacé par deux joysticks ; l’un pour la direction, l’autre pour la transmission et le contrôle des distributeurs hydrauliques. Massey Ferguson y ajoute la possibilité de passer en mode complètement autonome dans les champs. Trois écrans permettent alors de régler et de contrôler l’ensemble des fonctions du tracteur et des outils. Il n’y a plus non plus de rétroviseurs. Ceux-ci sont remplacés par deux caméras dont les images sont diffusées en cabine sur des écrans.
Le T6.180 Methane Power, disponible dès 2020
Fruit de plusieurs années de développement et d’essai, le T6.180 Methane Power devient un modèle « classique » de la gamme New Holland. Cela signifie qu’il apparaîtra au catalogue du constructeur dès la saison 2020.
Avec ce modèle, les agriculteurs pourront utiliser le gaz distribué via un réseau public ou le biométhane qu’ils produisent sur leur ferme. L’utilisation de ce carburant alternatif est un premier pas vers la décarbonisation de l’agriculture.
Question performance, le T6.180 Methane Power est doté d’un moteur FPT de 6,7 l et présente les mêmes performances que son équivalent diesel, à savoir une puissance de 180 ch et un couple de 740 Nm. Selon le constructeur, les intervalles de maintenance seraient, eux aussi, identiques. Les émissions de particules et de CO2 reculeraient respectivement de 99 et 10 %.
Les réservoirs de gaz sont situés dans la même position que les réservoirs diesel sur le modèle standard T6. La version au méthane est donc en tout point identique à son équivalent en matière d’accessibilité, de visibilité et de taille.
Pour ceux qui cherchent à prolonger les heures de travail, un réservoir additionnel est disponible en option. Il peut être monté sur le relevage avant ou le porte-poids, ou sur le relevage arrière pour les travaux avec chargeur. Le tracteur est également équipé à l’avant et à l’arrière de points de raccordement pour le gaz, ce qui permet d’imaginer un stockage de carburant supplémentaire être monté sur les remorques et outils.
La pulvérisation entre dans une nouvelle ère
Du pulvérisateur autonome…
John Deere a encore présenté un pulvérisateur autonome d’une capacité de 560 l. Il est équipé de quatre chenilles, toutes motrices, en vue de réduire la pression au sol mais aussi d’accéder plus facilement au champ et ainsi allonger les fenêtres de travail. Sa garde au sol est de 1,9 m, ce qui le rend très polyvalent.
… au drone de pulvérisation
En partenariat avec Volocoptere, une start-up allemande, l’Américain a dévoilé un drone de pulvérisation à 18 hélices et d’un diamètre de 9,20 m.
Il est équipé d’une rampe de pulvérisation et d’un scanner lui permettant de localiser les adventices et de les traiter spécifiquement. Les deux réservoirs du drone affichent une capacité totale de 10,6 l et se remplissent automatiquement sur une station de recharge installée en bordure de champ, là où la charge de la batterie a également lieu. Le temps de vol avec une batterie pleine serait de 30 minutes.
Le principal avantage de ce drone est l’application précise de pesticides, ce qui réduit considérablement les quantités utilisées. La pulvérisation aérienne est aussi possible quelles que soient les conditions du sol. Le constructeur annonce un débit de travail de 6 ha/h.
En outre, le cadre de l’engin est équipé d’un système de fixation standardisé et flexible. À terme, différents outils pourront donc être montés sur le châssis, en fonction de l’utilisation et des travaux à effectuer.