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Congé pour exploitation personnelle: quand le bailleur ne tient pas parole…

J’étais preneur d’une ferme avec plus de 40 ha de terres. Mon propriétaire m’a donné congé pour exploitation personnelle en 2009. J’ai quitté les biens loués en 2012. Néanmoins, je constate aujourd’hui que les bâtiments ne sont pas utilisés pour une exploitation agricole et que les prairies sont louées à un particulier. De plus, les bâtiments sont occupés par l’épouse du propriétaire. Celle-ci n’était pas indiquée dans le renom comme future exploitante. Quels sont mes droits ?

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Le bailleur peut en effet mettre fin au bail s’il a l’intention d’exploiter lui-même tout ou une partie du bien ou de céder l’exploitation à son conjoint, à ses descendants ou enfants adoptifs ou à ceux de son conjoint ou aux conjoints desdits descendants ou enfants adoptifs, ou à ses parents jusqu’au quatrième degré. Le sujet est réglé par les articles 7 et 8 de la loi sur le bail à ferme.

Indiqué dans le congé

Quand le bailleur reprend des terres louées sur base du motif d’exploitation personnelle, ces terres doivent être exploitées par la personne ou les personnes indiquées dans le congé comme devant assurer cette exploitation. De plus, la loi sur le bail à ferme exige, dans l’article 9, que cette exploitation soit effective et continue pendant 9 années au moins.

Réintégration du preneur, dommages et intérêts

Si le bailleur qui donne congé pour exploitation personnelle ne respecte pas les conditions légales, des sanctions sont prévues par la loi.

Selon l’article 13 de la loi sur le bail à ferme, le preneur qui a quitté les lieux loués à la suite d’un congé donné pour exploitation personnelle a droit à sa réintégration dans les lieux loués avec dommages-intérêts, ou s’il le souhaite, aux dommages-intérêts seuls, si, sans motifs graves, plus de six mois et moins de neuf années après l’évacuation du bien, celui-ci ne se trouve pas exploité par la personne ou les personnes indiquées dans le congé comme devant assurer cette exploitation.

En cas de contestation, la charge de la preuve incombe à celui ou à ceux en faveur de qui le congé a été donné.

La loi prévoit donc deux types de sanctions. D’une part, la réintégration dans les lieux loués, cela signifie que le preneur revient sur les terres ou dans les bâtiments qu’il a libérés, et d’autre part, la possibilité pour l’ancien preneur de demander des dommages-intérêts. Une combinaison des deux types de sanctions est possible.

Notons cependant que le preneur doit prouver son dommage. La jurisprudence ne comporte pas de jugements indiquant des indemnités à l’hectare. Dans ce domaine, il n’existe pas de barèmes forfaitaires. Selon nous, l’ancien preneur a droit à la réparation intégrale du préjudice subi. Il faut donc faire un calcul de la perte sur base de la surface des parcelles et du nombre d’années perdues. Pour ce faire, nous vous conseillons de tenir compte des barèmes du régime forfaitaire agricole.

C’est le juge du fond qui apprécie l’étendue du dommage causé par le bailleur, ainsi que le montant de l’indemnité accordée en réparation de celui-ci.

Agir à temps !

La demande de réintégration ou de dommages-intérêts basée sur le défaut de réalisation de l’intention annoncée par le bailleur dans le congé doit être introduite dans les trois ans de l’évacuation du bien loué. Celle qui est basée sur la cessation prématurée de l’occupation doit l’être dans les trois ans qui suivent cette cessation.

Précisons que la date d’invitation en conciliation de l’ancien bailleur suffit pour être dans les délais. En cas de non-conciliation, si vous souhaitez conserver la date de demande en conciliation comme date de début de procédure, l’ancien bailleur doit être cité en justice dans le mois suivant la demande.

Dans tous les cas, Il faut agir à temps pour ne pas perdre vos droits !

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