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«Faire le con, c’est un art. Être con, c’est un don!»

Avec le printemps, on porte un regard plus attentif sur les rayons « Jardinage » des grandes surfaces. Du coup, on peut remarquer que le Roundup fait son grand retour vers le grand public. Ouf, en plus, c’est en version BIO !

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Avec le printemps, on porte un regard plus attentif sur les rayons « Jardinage » des grandes surfaces. Du coup, on peut remarquer que le Roundup fait son grand retour vers le grand public. Ouf, en plus, c’est en version BIO !

Je me dis « Du Roundup BIO, c’est un oxymore ! Cela me semble l’envers et son contraire dans un même mot. » Mais non, Roundup n’est plus synonyme de glyphosate. C’est le nom de marque multiproduits des désherbants de Monsanto. La société annonce fièrement son taux de notoriété exceptionnel : 61 % quand le second désherbant connu ne fait que 6 %. C’est un peu comme pour les politiques : en bien comme en mal, l’important est qu’on en parle.

Il y en a pour tout le monde : ceux qui pensent faire la bonne affaire en trouvant… encore du Roundup, et ceux qui savent pouvoir faire confiance puisque c’est marqué BIO (Nouvelle matière active formulée par biocontrôle)

Il existe des versions « Prêtes à l’emploi » pour ceux qui ont un problème avec la règle de trois, et des versions « Concentrées » pour les plus finauds, leur laissant penser qu’il s’agit d’une version hautement professionnelle.

Il faut de bonnes lunettes pour trouver la matière active, l’acide acétique qu’on appelait jadis tout bêtement de l’extrait de vinaigre. Il existe des variantes à base d’acide pélargonique (extrait du géranium) également autorisé pour tous et partout.

Ceci dit, le citoyen lambda peut toujours acheter l’ancien Roundup (au glyphosate) sur internet sans phyto-licence puisque le législateur, dans sa grande sagesse, n'en a pas encore interdit la vente, seulement l’usage.

Quant au prix de ces nouveaux désherbants, des quantités nécessaires par application et du nombre de passages qu’il faut prévoir, n’en parlons pas. Un exemple au hasard : une formule en bidon de 3 l s’applique sur 90 m2 et coûte 39,9 €. S’il fallait l’appliquer sur 1 ha, cela ferait quand même 4.000 €. Et s’il faut recommencer 3 X dans l’année : 12.000 €

Pour ce budget-là, un agriculteur « ordinaire » produit 60 tonnes de sucre blanc ou de quoi cuire 80 tonnes de pain de ménage, bref de quoi nourrir pas mal de monde.

En fait, ceux qui demandent l’interdiction du glyphosate roulent pour qui ? Pour les firmes qu’ils combattent ? Celles-ci peuvent enfin profiter de l’aubaine pour démultiplier les profits.

Le comble, c’est de voir les puristes de l’environnement partir en guerre contre l’acide pélargonique, ce désherbant naturel censé remplacer le glyphosate. Pourquoi ? Selon un article d’Alerte Environnement, paru dans la presse le 15 juin, sa dangerosité serait « pire ? » que celle du glyphosate au test Daphnie pour les écosystèmes aquatiques : CE de 64 à 119 mg/l contre 243 mg/l à son concurrent. Il est vrai que les ouvriers des entreprises horticoles se plaignent maintenant d’irritation en fin de journée, ce qui n’arrivait pas avec son prédécesseur. L’horreur, c’est qu’ils ne peuvent pas mettre de masque car les clients ne croiraient pas qu’ils pulvérisent un produit naturel…

Et le comble du comble ? Sur base de critères objectifs, l’agence Européenne prévoit de ne pas renouveler les homologations des fongicides à base du cuivre, ce métal lourd toxique pour l’activité biologique des sols. Curieusement, ce sont à peu près les mêmes qui ont demandé l’interdiction du glyphosate qui militent maintenant pour le prolongement du cuivre fongicide (Le Sillon, 25 janvier 2018).

En fait on assiste à une rencontre au sommet entre le grand n’importe quoi mercantile et le grand n’importe quoi idéologique. J’ignore si cela se fait sous le haut patronage du ministre de l’Environnement mais c’est du grand art. Cela rappelle le commentaire d’un humoriste : « Faire le con, c’est un art. Etre con, c’est un don ! »

JMP

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