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Azote et froments en sortie d’hiver: tenir compte de la richesse des profils!

Le rendez-vous majeur des céréaliculteurs, le mercredi 22 février à Gembloux, avait une saveur toute particulière avec la célébration de la 50e édition du Libre blanc. Un événement très attendu également sur le plan des recommandations phytotechniques au regard d’une moisson 2016 très décevante et de réserves en azote minéral particulièrement abondantes en cette fin février.

Temps de lecture : 6 min

I mpossible de faire le point sur l’état des cultures céréalières et les premiers conseils de fertilisation azotée sans commencer par évoquer la situation climatique de ces derniers mois.

Plus chaud en septembre, plus froid en janvier

La température du mois d’août 2016 a été conforme à la normale ( tableau 1 ). Par contre, le mois de septembre a été sensiblement plus chaud que la normale. Les températures des mois d’octobre, novembre et décembre ont ensuite été similaires aux normes saisonnières. La nouvelle année 2017 a démarré sous une froidure considérée comme « anormale ».

tab 1

Sécheresse !

Quant à la pluviosité observée entre le mois d’août et le mois de décembre, le total se révèle bien inférieur aux normales saisonnières, à l’exception du mois de novembre. Toute cette période peut être considérée comme étant déficitaire sur le plan hydrique. La première quinzaine du mois de janvier dernier a été anormalement humide mais elle a été suivie par une nouvelle période sèche de quinze jours ramenant la moyenne mensuelle à la normale.

Entre émergence et tallage

Dressant, le 22 février, l’état de la situation aux champs au nom des nombreuses équipes de recherche partenaires dans l’édition du Livre Blanc des céréales 2017, Rodrigo Meza (Gbx Agro-Bio Tech) attira l’attention des agriculteurs sur la diversité des stades de développement des froments en lien avec la date de semis. Les cultures affichent de manière générale un léger retard par rapport aux années antérieures.

C’est ainsi que sur la plateforme expérimentale sise à Lonzée (Gembloux), les froments observés dans les essais consacrés aux dates de semis sont actuellement aux stades :

– tallage, pour les semis du 25 octobre ;

– 1-2 feuille(s), en ce qui concerne les semis de mi-novembre. L’an dernier, pour la même date de semis, les plantes atteignaient le stade tallage ;

– émergence, pour les semis de mi-décembre.

Beaucoup d’azote dans les profils…

Un échantillonnage des profils en froment d’hiver a été réalisé sur 90 cm dans 148 situations culturales, grâce à la collaboration des différents centres provinciaux et laboratoires d’analyse de sol du réseau Requasud.

Le profil moyen du sol pour les 148 situations culturales est de 80 kg N/ha, pour une profondeur de 90 cm. Ces 80 kg N sont répartis de la manière suivante : 24 kg (unités) dans l’intervalle de profondeur 0-30 cm, 34 kg dans l’intervalle d de profondeur 30-60 cm et 22 kg pour la couche 60-90 cm.

Rodrigo Meza relève que 42 % de cet azote total se situe dans la couche 30-60 cm et non dans le 3e horizon étudié (60-90 cm).

tab 3

Contrairement à ce qui peut être observé habituellement (tableau 3), on a pu constater, cette année un accroissement des niveaux d’azote dans le sol durant la période hivernale. Cet accroissement des teneurs en azote dans les profils de sols est dû à divers facteurs :

– des APL (azote potentiellement lessivable) plus élevés observés en entrée d’hiver. Ceux-ci sont dus à des rendements plus faibles en 2016 ;

– des sols historiquement secs. Le déficit de précipitation observé depuis août atteint 170 mm. Les précipitations importantes de la première quinzaine de janvier ont légèrement compensé cela, mais les sols présentent encore une sécheresse importante en profondeur. On estime que le déficit d’eau efficace dans le sol calculé sur 1 m d’épaisseur est de 35 mm ;

– un mois de janvier particulièrement froid (0,1ºC, contre 2,5ºC en normale) durant lequel la croissance des cultures a été quasi nulle ;

– une minéralisation importante, ayant sans doute eu lieu durant l’automne et jusqu’en décembre, mois durant lequel les températures ont été légèrement supérieures à la normale, et où les précipitations sont restées faibles mais régulières.

Les semis de la mi-novembre atteignent seulement le stade  1-2 feuilles.
Les semis de la mi-novembre atteignent seulement le stade 1-2 feuilles.

… imposant une fertilisation prudente !

Vu l’état de sécheresse important observé dans les sols, et plus particulièrement au-delà de 90 cm, le risque de lixiviation est très faible. L’azote présent dans le sol au début du printemps sera donc entièrement disponible pour la culture. Cela nous amène donc à revoir la fumure de référence, pour laquelle il conviendra en premier lieu de réduire le premier apport de fumure. La réduction de la dose dépendra du schéma de fractionnement adopté.

Concernant l’impact du précédent, une tendance générale à l’observation de reliquat plus important est observée cette année. L’accroissement est variable d’un précédent à l’autre :

– un reliquat supérieur de 20 kg N/ha en moyenne est observé en précédent betterave et maïs ;

– un reliquat supérieur en moyenne de 40 à 45 kg N/ha est observé pour les précédents pomme de terre, légumineuse, lin et froment ;

– un reliquat en moyenne supérieur de 60 kg N/ha est observé pour un précédent colza.

Ces reliquats plus importants auront un double effet, premièrement sur la fumure de référence qui sera revue à la baisse et deuxièmement sur les correctifs à apporter selon le précédent.

A ce stade de la saison, les modalités (2 ou 2 apports) sont adaptées par rapport à 2016. Le choix entre celles-ci sera fonction de la parcelle et du précédent. De toute manière, il est recommandé de calquer le programme en tenant compte des prévisions de précipitations. La fertilisation sera appliquée avant une pluie afin de maximiser l’efficacité du prélèvement d’engrais par la plante.

– le schéma en 3 fractions sera donc privilégié dans les situations culturales où il y a un précédent betterave (arrachage effectué après le 15 octobre), chicorée et maïs. Également, dans le cas d’un précédent froment, afin de favoriser la progression racinaire et compenser l’effet néfaste des maladies du système racinaire ;

– la fumure en 2 fractions sera pour sa part encouragée sur des précédents colza, légumineuse, pomme de terre et lin. Elle pourra également convenir dans le cas d’un précédent betterave dont l’arrachage a été effectué précocement.

La référence ?

En baisse !

La fumure de référence est réduite de 20 unités par rapport aux années antérieures :

– moins 10 unités au tallage et au redressement pour un schéma en trois apports ;

– moins 20 unités sur une modalité en deux apports.

Concrètement, les deux fumures de référence en 2017 sont :

– trois fractions : tallage : 40 N ; redressement : 50 N ; dernière feuille : 75 N  ;

– deux fractions : intermédiaire tallage-redressement : 60 N ; dernière feuille : 105 N.

Plus d’infos : le Livre Blanc,

février 2017.

Propos recueillis par

M. de N.

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