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De l’Épiphanie à l’épiaison,clin d’œil à Epicure

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L’Épiphanie, dans la culture judéo-chrétienne, marque la fin des fêtes de Noël. En grec, cela signifie « Il apparaît enfin ». Une étoile le signale aux rois mages, les puissants de l’époque. Notons au passage que les premiers à l’avoir accueilli étaient des bergers, des paysans.

Aujourd’hui, les puissants (dans leurs têtes en tout cas), ce sont les politiques qui se mettent en marche pour leur propre étoile. Elle devrait leur apparaître en mai, quand les élections consacreront ceux qui ont le plus séduit et/ou promis.

En mai, les épis apparaîtront dans les campagnes. L’épi, c’est l’aboutissement de la tige, la promesse de récolte « qui apparaît enfin ». La nature fera le reste : migration de tous les éléments nutritifs qui se trouvent dans les feuilles et la tige vers l’épi pour remplir le grain.

Entre mystère de Noël, mirage de la politique et miracle de la nature, intéressons-nous à un philosophe de la Grèce antique tant on peut y voir de convergences avec ce qui se passe en agriculture aujourd’hui.

Et d’abord son nom : EPICURE. Le symbole de l’épi, qui plus est, rime avec culture.

Ensuite son lieu de travail : contrairement à d’illustres contemporains qui occupaient le devant de la scène (ce qu’on appellerait aujourd’hui les médias), Epicure gardait les pieds sur terre et combinait nourriture de l’esprit et du corps. Il enseignait dans un jardin, à l’extérieur d’Athènes, le fameux jardin d’Epicure.

Il se tenait à égale distance de deux extrêmes : ceux qui ne pensent qu’à profiter dans la vie et ceux qui intellectualisent tout, se faisant volontiers donneur de leçon.

Rien de changé sous le soleil : il en est aujourd’hui qui cultivent la frustration si tous leurs besoins matériels ne sont pas satisfaits, et d’autres qui sont plutôt dans le registre de l’inquiétude qu’un ami me résuma un jour : « Quand on a faim, on n’a qu’un seul problème. Quand on n’a plus faim, on a mille problèmes… »

En tout cas, Epicure, dans son jardin, enseignait l’équilibre et la modération, exactement ce que pratique aujourd’hui la majorité des producteurs en agriculture raisonnée en combinant évolution technique et respect de l’environnement.

Avec Aristote, l’esprit scientifique émergeait prudemment. Epicure penchait du côté des sciences plus que des croyances.

Il tenait un discours de tolérance par rapport à ceux qui pensent différemment. Il fut critiqué, surtout par l’école platonique, qui considérait que l’esprit est tout et que le corps n’est rien. Ils donnèrent aux épicuriens la réputation de d’affreux consuméristes, alors qu’il n’en est rien. Exactement comme on fait passer aujourd’hui les agriculteurs en raisonné pour des super-intensifs inconscients.

C’est un mystère du temps présent : pourquoi ne veut-on pas prendre en compte tous les progrès réalisés depuis 50 ans en agriculture conventionnelle ? On fait sans cesse tourner en boucle une caricature de l’agriculture actuelle. Et pourtant, cette agriculture « de bon sens » excelle en rendement, qualité sanitaire et qualité gustative. Elle est durable dans tous les sens du terme.

Ce qui est sûr, c’est qu’Epicure aurait certainement mis en valeur les produits du terroir, l’agriculture familiale et locale, avec des prix raisonnables, respectant à la fois le producteur et le consommateur.

En épilogue, pouvons-nous espérer qu’un jour toute l’agriculture retrouve la confiance et la gratitude de la population qu’elle nourrit ? Si pas, en épitaphe pour nos « chers agriculteurs disparus », on écrira « C’était une race en voie de disparition. On n’a rien fait pour la conserver ».

JMP

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