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Pourquoi dénigrer une méthode simplement parce qu’on ne la maîtrise pas?

Dans le Sillon Belge du 21 mai, je lis le texte de JMP. Ce n’est pas la première fois que je relève son antagonisme pour l’agriculture biologique. Sa comparaison avec Trump en ce qui concerne des décisions politiques et/ou scientifiques sur la méthode de vaincre le Covid-19, décisions qui seraient toutes pareilles aux pratiques des écologistes, croit JMP, fait faire un sacré raccourci ! Je dirais même un biais.

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Les agriculteurs bios, plutôt qu’écologistes, n’ont pas comme adage de « laisser faire la Nature ». À mon sens, ils la protègent de leur mieux en la traitant avec les produits autorisés qui ne font pas partie des produits phytos (les herbicides, les fongicides, et autres « cides »).

C’est la « lutte intégrée », née en Suisse, qui propose que les végétaux soient atteints pour les traiter au chimique quand les pucerons et autres méthodes de phéromones n’ont pas réussi. Ça concerne surtout les fruiticulteurs et ce n’est pas si mal ! Mais, ces protagonistes ont essayé dans les pages du Sillon il y a quelques années de faire passer leurs méthodes comme étant « bio » par des articles de presse mais ils ont été vite remis à leur place par des observateurs attentifs à leurs publications. Il existe beaucoup de confusion(s) dans ces façons de traiter.

Moi-même, à la tête d’une microferme de cultures, je ne pratique pas l’agriculture biologique malgré mon engouement et j’en suis désolée parce que l’entrepreneur qui s’occupe de mes cultures ne la pratique pas (encore) et il va sans doute perdre certains de ses clients à cause de cela. Les robots de désherbage sont très chers et constituent un gros investissement supplémentaire.

Pratiquer l’agriculture biologique est un autre métier que l’agriculture traditionnelle et il faut pouvoir le maîtriser. Les méthodes, les produits sont différents et il faut du temps pour se former et aussi trois années pour la « conversion ». L’approche est plus subtile avec des idées plus souples. Remplacer le glyphosate est une gageure pas encore résolue sauf en binant les sols, ce qui coûte aussi de l’argent en énergie, en usure du matériel etc.

Comme tous les pionniers, les bios ont cru en leur nouvelle voie, se sont formés, se sont trompés puis ont compris de leurs erreurs. Leur courage toujours renouvelé et les encadrements en conseils leur ont profité.

J’ai compris que les conventionnels savent que l’agriculture bio existe, même s’ils essayent de la dénigrer, mais ils ne croient pas que c’est possible ou pensent qu’il y a de la fraude !

J’ai eu un témoignage l’année passée (08.11.19) lors d’un congrès, l’avis d’une agricultrice « haut placée dans le syndicat » qui me soutenait qu’avec entre autres ses quatre hectares de cultures maraîchères en bio, son exploitation n’en était pas sortie pour toutes sortes de raisons, et qu’elle était revenue au conventionnel. Son leitmotiv était que le bio n’était pas plus rentable que le conventionnel. Et quand je lui parlai des robots de désherbage, elle me répondit fâchée que les machines de désherbage, c’était un matériel, une sorte de planche avec trois Polonais qui arrachaient les adventices à la main ! Et que les Polonais pour faire ce travail étaient introuvables.

Je me doute que les diversifications aux cultures traditionnelles demandent beaucoup d’investigations préalables, des calculs de rentabilité, des simulations, des investissements et encore, même bien préparés, ces changements de cap comportent une grande part d’aléas et donc de risques.

Mais, promouvoir l’agriculture bio c’est aussi tendre vers plus de protection des sols. Encore une fois, je ne comprends pas qu’on disqualifie cette agriculture prometteuse qu’est l’agriculture bio ou qu’on trouve comme prétexte que « ce n’est pas notre philosophie » tout simplement parce qu’on ne la maîtrise pas.

Marlène André

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